Au-delà de sa fonction purement utilitaire, le photobooth a déchaîné les passions et l’inspiration des artistes depuis sa création. Cette fascination pour cette boîte à figer le temps s’est traduit à travers une utilisation dans tous les domaines de l’art. Comment le photobooth est devenu un objet tendance et inspirant ? Pourquoi les artistes peintres, photographes et penseurs s’en sont follement épris ?

Les débuts de l’art photomatique

Peu d’années après la création de la cabine photo, les artistes surréalistes sont fascinés par ce procédé de photographie automatique. En 1929, un photomontage réalisé par les artistes du mouvement illustre la passion et l’intérêt des peintres pour l’invention. L’œuvre est une petite huile sur toile faite à partir d’une œuvre de Magritte «Je ne vois pas la (femme) cachée dans la forêt » entourée de portraits de nombreux artistes surréalistes avec les yeux fermés. On peut notamment reconnaître Salvador Dalì, Paul Eluard ou Camille Goemans. Ce photomontage illustre le concept surréaliste de modèle intérieur, il montre ce que voient les surréalistes en fermant les yeux en dormant ou en rêvant d’une présence féminine. Cette première expérience artistique avec le photobooth sera la première d’une longue liste.

Photomontage “Je ne vois pas la (femme) cachée dans la forêt” Magritte. © Theartstack

Le photomaton et la mode

Dans les années 50, le célèbre photographe de mode Richard Avedon réalise des portraits de célébrités pour le magazine masculin Esquire. Le photographe installe une cabine photo dans son studio et laisse libre cours à l’imagination de ses invités dès lors que le rideau est tiré. L’objectif pour Richard Avedon était de mettre l’accent sur la spontanéité et l’insouciance de la capture « Je voulais prouver que tout n’était pas l’objectif ; que la bonne photographie était dans la conception (…) la partie métier de la photographie pourrait ressembler à de l’écriture. Pour moi, c’est la profondeur, la spontanéité ». Le résultat est bluffant : loin du regard du photographe, l’essence des personnes est captée à la perfection avec une Marilyn Monroe plus affriolante que jamais et une Audrey Hepburn insouciante entourée de son mari Mel Ferrer et de Truman Capote.

Mel Ferrer, Truman Capote et Audey Hepburn par Avedon. © Flavorwire

Les précurseurs

Une quinzaine d’années plus tard, c’est le grand artiste du pop art Andy Warhol qui se lance dans l’expérience artistique du photomaton. Ainsi, en 1963, ce dernier propose à une collectionneuse new-yorkaise jusqu’à maintenant inconnue du grand public, Ethel Scull, de s’installer dans une cabine photo de Times Square. Des centaines de clichés plus tard, Warhol créa sa première œuvre peinte à partir de photos connue sous le nom d’Ethel Scull 36 times.

C’est cependant Franco Vaccari, un jeune artiste italien, qui va explorer la dimension conceptuelle du photomaton. Ce dernier installe en 1972, un photomaton à la Biennale de Venise et invite les visiteurs à se photographier et laisser un témoignage photographique sur le mur de la salle. Au total, 40.000 clichés seront collectés pour construire une magnifique œuvre collective.

La thérapie du photomaton

Pendant trois ans, de 1979 à 1981, Alain Baczynsky, un étudiant en art d’origine belge s’est livré à des séances photo psychanalytique. Après chaque séance chez son psychanalyste, ce dernier passe par un automate à Paris et se prend en photo. En trois ans, 242 clichés seront pris réalisant ainsi un autoportrait rempli d’émotions nommé « Regardez, il va peut être se passer quelque chose ».

Ainsi, le photobooth a été une source d’enthousiasme et de poésie depuis sa création et continue d’inspirer les esprits. En 2010, Yu Tsai un photographe américain d’origine taïwanaise a organisé une session de photos dans un photobooth avec de nombreuses célébrités telles que Leighton Meester ou Kate Blanchet. Notre seule question c’est…. quel sera le prochain chef d’œuvre avec un photobooth ?

Alain Baczynsky, Regardez, il va peut-être se passer quelque chose. © Amanda Tetrault